Fédérer un réseau constitué de différentes organisations n’est pas une affaire aisée. Une des premières étapes peut consister à ce que chaque acteurs puissent se représenter visuellement la place qu’il occupe, ce dont il peut bénéficier et ce qu’il peut apporter au sein du réseau. Ce travail est souvent soit laissé de côté, au risque d’altérer le sens que peuvent y trouver les parties prenantes, soit réducteur des différentes dimensions des contributions et des synergies possibles. Neoz a repéré une méthode élaborée par Michel de Kemmeter, la méthode 7D-Value, permettant de représenter visuellement les synergies d’un écosystème dans toute leur diversité.

7D-Value : une approche systémique de la valeur.

La méthodologie 7D-Value mise au point par Michel de Kemmeter, dans son ouvrage  » Le nouveau jeu économique » permet de rendre visible de façon appropriable les complémentarités et les synergies de coopération entre acteurs d’un écosystème complexe d’organisations sur 7 niveaux d’analyse de la valeur.

Avec le développement du numérique, « le nouveau jeu économique » ouvre de nouvelles perspectives d’alliances stratégiques. Pour saisir ces opportunités offertes, la méthode 7D-Value permet de faciliter progressivement la mise à plat et la visualisation des ressources, besoins de chaque acteur et des liens entre eux. En effet, dans son ouvrage Michel de Kemmeter illustre remarquablement, par des exemples concrets, le fait que quelque soit la taille ou la force d’une organisation, le monde économique dispose de beaucoup plus d’intelligence, de moyens que sa propre organisation et qu’ainsi, en agissant seul, il devient périlleux de porter des stratégies ambitieuses alors que la coopération rapide, étendue et profonde d’acteurs est facilitée par le numérique. Les crises successives et fulgurantes qu’ont connu des acteurs considérés il y a encore peu comme des leaders incontournables, faisant « loi » dans leur secteur, le démontrent. La crise que connaissent de nombreux grands acteurs historiques de la grande distribution en est un exemple particulièrement marquant.

En effet, chez Neoz nous pensons, que vouloir maîtriser, dans une posture de donneur d’ordre propriétaire, l’ensemble des dimensions de sa stratégie est extrêmement coûteux en temps et en ressources. A l’heure, où l’on peut disposer à la demande de réseaux sociaux d’entreprise, de market places, d’une logistique connectée, de services de bank as a service, à très faible coûts d’investissement en ne payant qu’à chaque transaction de vente réellement déclenchée, investir lourdement dans frais fixes doit être réfléchi à deux fois. De surcroît, de nombreuses infrastructures physiques ou numériques sont sous-utilisées et ainsi trouver les conditions d’accès à d’abondantes capacités inemployées est non seulement très rentable mais aussi contribue à la soutenabilité de sa stratégie. A l’ère d’une autre grande rupture, celle d’une demande grandissante de modèles économiques éco-responsables, il devient primordial d’intégrer l’approche systémique multi-parties prenantes dans sa stratégie.

7D-Value : comment cela fonctionne ?

La méthode 7D-Value consiste à affiner la notion de valeur en 7 dimensions et à faire positionner chaque acteur par rapport à celles-ci sous la forme d’actifs (ressources dont je dispose) et de passifs (carences ou externalités négatives). A la suite d’une analyse de ces 7 dimensions, une représentation visuelle synthétise le « bilan » de chaque acteur sur ces 7 dimensions.

Des mots clés renseignent les différents actifs et passifs permettent de faire l’inventaire de la valeur de chaque acteur, qui peuvent, grâce à des liens hypertextes, renvoyer à la documentation détaillée des travaux.

Ce travail peut être réalisé pour commencer avec une réflexion individuelle préalable par questionnaire, puis en des binômes ou en sous groupes en co-développement puis en restitution afin de rendre robuste le diagnostic et la connaissance entre chaque acteur.

Une deuxième étape consiste ensuite à représenter sur un grand panneau/écran les liens à créer pour identifier les complémentarités entre les acteurs. Un jeu de couleurs des liens peut permettre de « qualifier » la nature des liens (par exemple : existant/à contruire, informel/quasi-contractuel/contractuel, relationnel/commercial/capitalistique…).

7D-Value : une vision biomimétique de la valeur.

Venons-en à la nature des 7 dimensions proposées par la méthode sachant qu’il ne s’agit pas ici de les détailler mais d’en comprendre la nature.

Michel de Kemmeter propose de voir l’organisation comme un corps vivant en faisant une analogie biologique de l’organisation :

  • Bilan « Terre » : les racines de l’organisation, son empreinte écologique
  • Bilan « Matériel et financier » : l’énergie vitale, notamment l’argent
  • Bilan « Processus » : les intestins de l’organisation qui transforment les ressources en énergie.
  • Bilan « Emotions » : la part sensible de l’organisation.
  • Bilan « communication » : la voix de l’entreprise et la façon dont elle se fait entendre, sa notoriété.
  • Bilan « Connaissance » : le cerveau de l’organisation, sa R&D, ses processus d’apprentissage et de développement de la connaissance.
  • Bilan « Bien commun » : l’âme et les yeux de l’organisation, la clarté, la conscience et l’incarnation de sa vocation, de ses valeurs, de ses ambitions et intentions stratégiques.

Si ces dimensions sont forts intéressantes ainsi que l’analogie biologique séduisante, elles peuvent être adaptées ou complétées. Chez Neoz, la notion d’accès au marché (nombre de clients, de réseaux activables…) peut nous sembler importante. Elle peut enrichir par exemple le Bilan communication ou processus.

Par ailleurs, il nous semble important de qualifier la notion de bien commun non pas comme une ressource ou un besoin mais comme une finalité (les externalités positives des bilans). Dans cette notion de bilan de « bien commun », nous préférons nous attacher aux mécanismes le favorisant, c’est à dire aux compétences facilitant l’intelligence collective qu’un ou plusieurs acteurs pourraient proposer. Nous voyons dans cette dimension de conditions du bien commun, trois « actifs » possibles capables de favoriser et de renforcer les liens entre acteurs :

  • La neutralité
  • La réflexivité
  • la proximité ;

trois dimensions clés identifiées par Pierre Rosanvallon comme fondatrices de la légitimité démocratique.

En effet, quelque soit les qualités, les actifs/passifs et même les valeurs partagées par les acteurs, il nous semble qu’un écosystème d’acteurs doit disposer de capacités régulatrices et de prise en compte de chacun qui font souvent défaut aux collectifs mêmes les plus soudés. L’exigence de l’activité au quotidien peut épuiser les élans originels et ainsi identifier clairement des compétences permettant de « faire lien » et d’en prendre soin dans un écosystème semblent essentielles.

Cette dernière dimension n’est pas anodine dans un système d’acteurs complexe car elle soulève concrètement la question de la gouvernance. Elle peut aller jusqu’à s’interroger quant à la nécessité ou non de créer une « instance tierce », indépendante des acteurs impliqués, pour garantir les intérets de chacun. Ce « service écosystémique » particulier est un sujet passionant que nous évoquerons dans un prochain article consacré à la notion d’écosystème.

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